Exploration pétrolière : le lancement de forages au nord de la Namibie suscite l’inquiétude - mongabay

Le 21 décembre dernier, la société Reconnaissance Energy Africa (Recon Africa) a annoncé qu’elle avait lancé des forages d’exploration pétrolière et gazière sur la portion namibienne de la zone de conservation transfrontalière du Kavango-Zambèze (Kavango-Zambezi Transfrontier Conservation Area ou « KAZA »). Cette décision a alarmé les militants de la cause environnementale et les populations locales qui s’inquiètent de ses possibles répercussions sur les cours d’eau, les habitants et la faune de la région.

 

Recon Africa détient un permis l’autorisant à explorer 2,5 millions d’hectares dans le nord-est de la Namibie et accordé en janvier 2015 à la société à laquelle elle a succédé. La majorité du territoire couvert par ce permis d’exploration pétrolière (le Petroleum Exploration Licence 73 ou « PEL 73 ») se situe dans la région de la KAZA, une zone de conservation d’une superficie de 520 000 km² partagée entre l’Angola, le Botswana, la Namibie, la Zambie et le Zimbabwe. La société possède également un permis de prospection pétrolière dans une portion de la KAZA d’une superficie d’un million d’hectares et située au nord-ouest du Botswana. Elle espère y lancer les premiers forages en 2021.

 

Inquiétudes

La zone de conservation transfrontalière du Kavango-Zambèze abrite la plus vaste population d’éléphants d’Afrique et est l’un des derniers bastions du lycaon (Lycaon pictus). Les régions du Botswana et de la Namibie sur lesquelles Recon Africa est autorisée à mener des opérations d’exploration se situent en grande partie dans le bassin du fleuve Okavango, qui se déverse dans le delta de l’Okavango, un site classé au patrimoine mondial de l’UNESCO et reconnu pour la richesse de sa biodiversité. Les défenseurs de l’environnement s’inquiètent tout particulièrement des éventuelles répercussions des forages sur les cours d’eau interconnectés du bassin du fleuve.

 

« Nous en savons très peu sur les ressources en eaux souterraines des zones d’extraction pétrolière et gazière dont il est ici question », déclare Surina Esterhuyse, une hydrogéologue de l’université de l’État-Libre en Afrique du Sud. « Au Botswana, le bassin du fleuve Okavango est encore relativement préservé, mais les projets d’exploration et d’extraction pourraient avoir de graves impacts sur le delta [de l’Okavango]. »

 

Recon Africa effectue des forages dans un bassin sédimentaire d’une profondeur de 9 000 mètres que les géologues désignent sous le nom de « bassin du Kavango ». L’objectif est de déterminer si le sous-sol de la KAZA recèle effectivement du pétrole, et s’il est possible d’en tirer profit. Selon les estimations de Daniel Jarvie, un géochimiste travaillant comme consultant pour Recon Africa, le bassin pourrait renfermer un volume de pétrole et de gaz extractibles équivalent à celui du bassin de l’Eagle Ford au Texas. Depuis le début de la production en 2008, plus de 20 000 puits de gaz et de pétrole ont été forés à Eagle Ford.

 

« Le potentiel impact de l’extraction de gaz et de pétrole sur les ressources en eau de la Namibie et du Botswana est notre principale source d’inquiétude », explique Esterhuyse, dont les travaux portent sur les conséquences de l’extraction gazière et pétrolière sur les ressources en eau souterraine. Nos deux préoccupations majeures sont la consommation en eau dans des régions telles que le nord de la Namibie, où elle est une ressource rare, et l’éventuelle contamination des sources d’eau lors de l’extraction du gaz et du pétrole.

 

Les risques posés par l’extraction gazière et pétrolière sont démultipliés si l’on a recours à des techniques de fracturation hydraulique non-conventionnelles, ou fracking. Aussi, les « hydrocarbures non conventionnels » auxquels fait régulièrement référence Recon Africa dans sa documentation marketing, ainsi que le recrutement d’ingénieurs en fracturation hydraulique expérimentés, font planer le doute sur les intentions de l’entreprise.

 

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